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VENTILO

Photographe et/ ou artiste


Actualité de la photographie, entre le centre d’art et Internet, l’approche documentaire et l’art contemporain


Un malentendu. Les frontières entre la photographie et l’art contemporain subsistent-elles malgré tous les beaux discours sur la pluridisciplinarité ? Dominique Baqué, critique pour Art Press et avocate de la photo "plasticienne", s’oppose à une histoire autonome du médium pour l’intégrer pleinement dans le champ plus vaste de l’art(1). A Marseille, au-delà des noms de Valérie Jouve, Antoine d’Agata ou Bernard Plossu, ces deux territoires semblent s’ignorer et les photographes ont fini par constituer leurs propres circuits de circulation. Le plus (re)connu des lieux "spécialisés", l’Atelier de Visu, ouvre la semaine prochaine une exposition en forme de carte blanche aux éditions Filigranes. Créée il y a seize ans par Patrick Le Bescont, cette originale maison d’édition défend le croisement de l’image avec l’écriture, collaborant avec des écrivains et des poètes pour réaliser des livres-objets à chaque fois uniques. Exploitant les possibilités de l’édition de façon audacieuse, l’artiste intervient dans la recherche d’une mise en forme pour ses images, avec une attention particulière accordée à la dimension matérielle et palpable des oeuvres. Rien n’est impossible : livre accordéon, mélanges de papiers différents, adhésifs, emboîtages, livres postaux, latex, reliures à la chinoise...

Autre projet à avoir vu le jour, Bruit d’image, revue sur Internet (www.bruitdimage.com) créée par Olivier de Sépibus, réunit un ensemble représentatif de la nouvelle génération de photographes installés à Marseille (Pascal Grimaud, André Mérian, Anne Delrez, Stéphanie Têtu ou Stéphanie Majorale). Dans le panorama un peu sinistré des projets éditoriaux palpitants, le réseau web permet de surmonter les problèmes de distribution et apporte un nouveau souffle au format revue, introduisant le diaporama d’images et la création sonore.

Les Ateliers d’Artistes poursuivent quant à eux un travail de diffusion de la photographie contemporaine dans un cadre institutionnel, avec l’exposition de Monique Deregibus(2). Pour l’artiste, les enjeux politiques du Vieux Continent passent par la Méditerranée, Hôtel Europa est une réflexion en images à travers trois villes reliées par la métaphore du port : Sarajevo, Odessa et Marseille. Les traces d’un paysage urbain en ruine glissent d’une ville à l’autre sans qu’on puisse déterminer s’il s’agit de construction ou de déconstruction. Son travail classique de composition formelle rend sensible la violence sourde au coeur même des villes. A Sarajevo, les cicatrices de la guerre sont encore perceptibles sur la peau des immeubles, se juxtaposant à de grands panneaux publicitaires de multinationales. Un territoire désorganiser qui peut rappeler Marseille dans le constat d’une crise de l’urbanité - le paysage serait devenu un non-lieu et l’humain est à la fois hors champ et partout. Cependant, à force de constater avec cette netteté radicale, n’y aurait-il pas la possibilité d’invention d’un territoire ? L’espace fictionnel nous arrive par Odessa, où l’artiste met en correspondance un champ-contrechamp des célèbres escaliers monumentaux du Cuirassé Potemkine et un extrait du film, associant la mémoire des lieux à l’imaginaire cinématographique. Si la force politique du film d’Eisenstein est dans la manipulation qu’il fait du montage, Deregibus préfère la mise à distance pour agir sur le temps long de la mémoire.

A l’autre bout de la planète photo, l’iconoclaste Stephen Wilks organise une de ses marches-performances, intitulée Anes Voyageurs (un projet déclencheur de situations où il promène sur son dos un âne en feutre rembourré) avec départ ce samedi à la Joliette et arrivée à la galerie La Tangente du Marché aux Puces. Là aura lieu une exposition, en collaboration avec le FRAC et Art’ccessible, à partir de ses dispositifs de participation, avant qu’il ne soit l’objet d’un large panorama l’année prochaine à la Villa Arson.

PEDRO MORAIS

(1) Dans son polémique dernier livre, Photographie plasticienne : l’extrême contemporain, elle fustige aussi bien l’esthétique du banal (quand celle-ci croit pouvoir restituer un réel spontané), que l’omniprésence de l’intime (accusée d’un repli sur soi autarcique), pour constater un renouvellement d’une image documentaire plus attentive à l’imagination et à la forme.

(2) Elle a dirigé avec Olivier Menanteau les Ateliers Nadar, une galerie essentielle des années 90 à Marseille. Cette exposition fera l’objet d’un catalogue avec des textes de Jean Luc Nancy, Jean-Pierre Rehm et Zahia Rahmani

 

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